Traits d’histoire de vie des mammifères africains et leur présence dans les paysages anthropiques – The Applied Ecologist
Alice Bernard et ses co-auteurs décrivent comment ils ont utilisé conjointement les connaissances écologiques locales et les données des pièges photographiques. Avec le recul, ils discutent de la manière dont l’implication de la population locale dans des projets de recherche peut renforcer les efforts de conservation dans la réserve de biosphère de la Garden Route (GRBR), en Afrique du Sud.
Le parc national de la Garden Route (GRNP), situé dans la réserve de biosphère éponyme, est l’un des seuls parcs nationaux véritablement non clôturés d’Afrique du Sud. L’absence de clôtures permet à la faune de se déplacer librement entre les zones protégées et les terres environnantes, ce qui rend la collaboration avec les populations essentielle pour une conservation efficace.
Le projet de recherche est né de discussions entre des chercheurs du Laboratoire international de recherche REHABS, de l’Université Nelson Mandela et des services scientifiques des parcs nationaux sud-africains. Ces discussions ont mis en évidence la nécessité de combiner les outils traditionnels de surveillance de la faune, comme les pièges photographiques, avec des approches participatives, telles que des entretiens et des enquêtes, pour mieux comprendre la répartition des mammifères dans les paysages anthropiques et interagir avec les parties prenantes.
La recherche
Nous avons déployé 75 pièges photographiques dans et autour du GRNP, afin de surveiller les espèces de mammifères sauvages et d’engager des conversations avec les différentes parties prenantes locales. Trente-trois acteurs (habitants, agriculteurs, forestiers) se sont engagés dans le projet.
Nous avons ensuite développé une approche basée sur des entretiens pour recueillir des données supplémentaires sur les occurrences de mammifères et identifier les valeurs et les perceptions de la population locale concernant les mammifères. La pandémie de COVID-19 a nécessité le passage des entretiens en face à face à une enquête en ligne, envoyée via des listes de diffusion, des groupes Facebook et WhatsApp. Cette approche s’est avérée efficace, donnant lieu à 247 réponses.
Les pièges photographiques et l’enquête basée sur les connaissances écologiques locales ont été conçus en utilisant la même grille géographique. (Bernard, Guerbois, Venter, et al., 2024)permettant l’intégration des données des deux méthodes. Un modèle d’occupation intégré a été utilisé pour analyser l’occurrence des espèces le long d’un gradient de transformation anthropique du paysage.
Leçons apprises
Dans le GRBR, l’aire protégée joue un rôle crucial dans la préservation des espèces de grande taille et des espèces ayant un régime alimentaire plus spécialisé, même si une diversité d’espèces a été détectée dans le paysage. De plus, les habitats naturels étaient très précieux pour préserver les mammifères ayant une stratégie démographique lente. Ces résultats ont des implications directes sur l’aménagement du territoire, suggérant que les efforts de conservation devraient donner la priorité à la protection des habitats naturels afin de prévenir la perte de biodiversité locale.
De plus, la recherche a démontré la faisabilité et les avantages de combiner différentes méthodes de surveillance. Pour les gestionnaires de la conservation, cette approche peut améliorer la couverture spatiale et la détection des espèces de mammifères. L’intégration s’est avérée particulièrement utile pour documenter la présence d’espèces rares et énigmatiques telles que le céphalophe commun (Sylvicapra grimmia) ou la loutre africaine sans griffes (Aonyx capensis) dans le GRBR.
De plus, l’étude s’est avérée précieuse pour les praticiens car elle documente les pratiques et les connaissances des gens sur les mammifères sauvages, ce qui peut être précieux à des fins de conservation. Le caractère unique du GRNR, sans clôtures, nécessite des approches de gestion spécifiques qui sont souvent négligées par les praticiens d’autres aires protégées qui ne considèrent pas ce qui se passe au-delà de leurs propres clôtures. Par exemple, Lizette Moolman et Melanie de Morney se sont appuyées sur les connaissances locales pour optimiser les configurations de pièges photographiques à l’intérieur du parc. (Moolman et coll., 2019).
L’approche utilisée a favorisé la participation de diverses parties prenantes et nous a permis d’entrer en contact avec la population locale et de les impliquer dans la recherche sur la conservation. Instaurer la confiance avec les parties prenantes est une étape importante pour co-concevoir des espaces anthropiques respectueux de la faune, acceptés par les résidents et résilients. L’alignement des connaissances écologiques locales sur les efforts de piégeage photographique peut présenter de nombreux avantages, non seulement du point de vue de la collecte de données écologiques, mais également en favorisant des expériences de co-apprentissage à long terme.
La réussite de ce projet n’aurait pas été possible sans le soutien et la participation des habitants locaux et des acteurs du GRBR, à qui nous sommes reconnaissants.
Lire l’article complet « Combiner les connaissances écologiques locales avec des pièges photographiques pour évaluer le lien entre les traits d’histoire de vie des mammifères africains et leur présence dans les paysages anthropiques » dans Journal d’écologie appliquée.