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26/08/2024

Enchevêtré ? Comment résoudre les rétroactions entre diversité et productivité dans les systèmes naturels


Prairie avec sétaire (Alopecurus spp.) dans le Schorfheide-Chorin, crédit : Victoria Henning.

Karl Andraczek (@KarlAndraczek), du Centre allemand de recherche intégrative sur la biodiversité (iDiv) Halle-Jena-Leipzig, revient sur son article : Faibles relations réciproques entre productivité et biodiversité végétale dans les prairies aménagées

Planter le décor

Le changement global a un impact à la fois sur la diversité végétale et sur le fonctionnement des écosystèmes, avec des conséquences néfastes sur les contributions de la nature aux populations. La prévision de ces conséquences est devenue un sujet central en écologie, mais il est difficile de faire de telles prédictions. Un défi de longue date consiste à démêler les effets de rétroaction complexes entre diversité et productivité, en particulier lorsque la diversité et la productivité sont échantillonnées à un seul moment dans le temps. Un autre défi consiste à prendre en compte leur interaction complexe avec d’autres facteurs biotiques ou abiotiques, car la diversité et la productivité sont contrôlées conjointement par de nombreux facteurs, notamment les activités de gestion, ce qui confond probablement les relations observées dans les systèmes naturels. Pour surmonter ces défis, nous avons besoin de nouveaux outils et cadres analytiques pour « démêler » leurs retours !

Empêtré dans des boucles de rétroaction

Lors de la rédaction de ma proposition de doctorat, mon directeur de thèse Fons van der Plas (@fonsvanderplas) a suggéré de résoudre ce problème à l’aide de modèles d’équations structurelles complexes. Cependant, une fois que j’ai commencé mon doctorat et après d’interminables discussions, essais et recherches documentaires, nous nous sommes rapidement sentis empêtrés dans des boucles de rétroaction. Puis, après avoir présenté mon travail à l’Université d’Utrecht, nous avons reçu un conseil prometteur de Laura Dee (@LauraEllenDee; CU Boulder, US) et son équipe de l’autre bout du globe. Ils utilisaient une approche innovante pour étudier les relations causales dans des contextes d’observation. Après l’avoir contactée, elle était impatiente de l’aider et, au fil de nos discussions, une idée a commencé à prendre forme.

L’étude

Dans notre étude, nous avons proposé une solution pour résoudre les boucles de rétroaction entre diversité et productivité en utilisant des méthodes du domaine de « l’inférence causale » rarement utilisées en écologie, et en les combinant avec des données temporelles à haute résolution sur la diversité végétale et la productivité mesurées à plusieurs fois au cours de la saison de croissance.

Notre nouvelle approche présente deux avantages majeurs:

(1) Nous pouvons quantifier l’effet causal de la biodiversité sur la productivité, et vice versaen tenant simultanément compte des facteurs de confusion non observés (c’est-à-dire qu’ils soient mesurés ou non !).

(2) En utilisant des données temporelles, nous pouvons distinguer les effets de rétroaction en construisant des séquences temporelles d’événements de cause à effet (par exemple, la richesse en espèces au printemps comme cause de la productivité estivale). Ce faisant, nous pouvons détecter les effets de la biodiversité sur la productivité, ou vice versamême s’ils sont temporellement retardés (par exemple, en raison des effets retardés des rétroactions plante-sol).

Il est important de noter que nous avons également comparé notre nouvelle approche statistique (modèles bidirectionnels à effets fixes) avec des méthodes plus couramment utilisées en écologie (dans ce cas, des modèles à effets mixtes) pour évaluer si cela modifierait nos conclusions écologiques.

Ensemble, Fons van der Plas, Laura Dee et moi-même, avec le soutien d’Alexandra Weigelt (co-supervisrice) et de nombreux autres collaborateurs, nous avons testé ce cadre en collectant des données d’observation saisonnières sur deux ans, sur 150 sites de prairies gérés en Allemagne. dans le cadre du projet à grande échelle Explorateurs de la biodiversité projet (@BExplo_research). Cela impliquait un travail pratique : ramper dans les prairies, transpirer dans les prairies sèches exposées au soleil, patauger dans les carex marécageux et parfois fuir des vaches trop curieuses.

À gauche : pâturage dans le Schorfheide-Chorin, crédit : Markus Rubenbauer ; en haut à droite : prairie de carex dans le Schorfheide-Chorin, crédit : Victoria Henning ; en bas à droite : prairie sèche du Jura souabe, crédit : Karl Andraczek.

Principales conclusions

Nous n’avons trouvé que de faibles effets de rétroaction entre la diversité végétale et la productivité dans nos prairies gérées, probablement en raison de pratiques de gestion intensives. Étonnamment, nous avons également constaté de faibles effets de la productivité sur la biodiversité, contrastant à la fois entre les relations souvent fortement négatives observées dans les prairies gérées et les relations positives observées dans les expériences sur le fonctionnement de la biodiversité et des écosystèmes. Nous soutenons que les faibles effets étaient probablement dus à l’élimination régulière de la biomasse par le pâturage/la fauche, qui peut prévenir les effets négatifs de la productivité sur la biodiversité en atténuant la concurrence légère, ce qui indique que la gestion est un facteur clé modifiant les relations diversité-productivité.

Cependant, notre conclusion écologique était très sensible aux modèles utilisés: les effets estimés à partir des modèles conventionnels étaient plus susceptibles d’être biaisés par des variables confusionnelles non observées (par exemple, les chocs climatiques), tandis que notre approche de modélisation restait robuste. Pourtant, pour améliorer nos prévisions, des séries chronologiques plus longues sont nécessaires !

Synthèse et travaux futurs

Démêler les effets de rétroaction dans les systèmes naturels est une tâche ardue – mais il y a de l’espoir! Des approches alternatives peuvent nous aider à surmonter les limites de nombreuses approches couramment utilisées et, à leur tour, ouvrir de nouvelles voies de recherche.

Nos résultats soulignent que les données temporelles, combinées aux méthodes d’« inférence causale », constituent un outil prometteur pour mieux comprendre les boucles de rétroaction entre la diversité végétale et la productivité dans les systèmes naturels. Cela a également des implications importantes pour élucider comment la biodiversité et le fonctionnement des écosystèmes réagiront au changement climatique, ce qui sera au centre de mes futurs travaux dans le cadre d’un Marie Curie bourse postdoctorale (à l’Université d’Utrecht, Pays-Bas et CU Boulder, États-Unis). Même au-delà des relations diversité-productivité, notre cadre pourrait fournir de nouvelles informations sur divers types de boucles de rétroaction dans les systèmes naturels.





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