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Démêler l’identité des sons des poissons pour soutenir la conservation marine – Methods Blog


Message fourni par Xavier Mouy

Sons de poissons et conservation marine

De nombreuses espèces de poissons produisent des sons pour attirer les partenaires, effrayer les prédateurs ou défendre leur territoire. Ces sons nous sont très utiles, nous les scientifiques ! Rien qu’en écoutant l’océan, nous pouvons détecter la présence de différentes espèces de poissonsdéduire leur comportement et potentiellement savoir combien de poissons il y a dans un environnement. Cela présente de nombreux avantages par rapport aux méthodes de surveillance traditionnelles. Il est totalement non intrusif (nous écoutons passivement), nous pouvons enregistrer du son sur de longues périodes (des mois voire des années), n’est pas affecté par les conditions d’éclairage (jour/nuit), et nous pouvons enregistrer sur de grandes surfaces. Cette approche est attrayante pour les objectifs de conservation marine et de gestion des pêches car elle peut améliorer considérablement les efforts de surveillance des poissons dans les habitats sensibles tels que aires marines protégées.

L’utilisation des sons de poissons pour surveiller les poissons a beaucoup de potentiel, mais elle est actuellement limitée par le fait que de nombreux sons de poissons n’ont pas été liés à des espèces spécifiques. Historiquement, on sait depuis le 4ème siècle avant JC que les poissons produisent des sons, mais nous savons encore très peu de choses sur les différents types de sons émis par les poissons et sur l’utilisation qu’ils en font. Actuellement, nous savons qu’environ 1000 espèces de poissons dans le monde produisent des sons. Cependant, il est fort probable que beaucoup plus d’espèces produisent du son, mais n’ont pas encore été enregistrés et identifiés. Ce manque de connaissances est en partie dû au fait qu’il n’existe pas d’instruments facilement disponibles capables d’identifier facilement les sons que les poissons produisent dans leur habitat naturel. Dans notre article, nous proposons un ensemble d’instruments qui répondent à cet important besoin de recherche.

L’enregistrement des sons des poissons dans la nature est la clé

Enregistrer les sons de différentes espèces de poissons peut sembler banal : il suffit de mettre des poissons dans des bassins et de les enregistrer avec un hydrophone. Malheureusement, la réalité est rarement aussi simple. Bien que cela puisse parfois être réusside nombreux poissons ne produisent pas de sons en dehors de leur habitat naturel et s’ils le font, les sons enregistrés sont souvent déformés par le acoustique complexe des cuves. Nous devons donc les enregistrer dans la nature. Cela nécessite des hydrophones pour enregistrer les sons et des caméras pour identifier visuellement les espèces qui les fabriquent. Mais simplement enregistrer des sons ne suffit pas. Nous devons localiser précisément d’où proviennent les sons pour nous assurer que le poisson vu par la caméra est bien celui qui produit le son.

Conception de baies audio-vidéo portables

Pour y parvenir, nous avons développé des réseaux audio-vidéo autonomes composés de plusieurs hydrophones et caméras vidéo qui sont déployés dans l’océan. En mesurant la différence de temps d’arrivée d’un son à chaque paire d’hydrophones, nous pouvons localiser les sons des poissons en 3D. Les sons localisés avec les matrices sont ensuite mis en correspondance avec les enregistrements vidéo pour identifier les espèces et le comportement des poissons dans une image vidéo donnée. L’un des premiers défis lors du développement de ces baies audio-vidéo a été de trouver un système de caméra autonome, peu coûteux et capable d’enregistrer des vidéos pendant plusieurs jours. Nous ne pouvions pas trouver de caméras vidéo prêtes à l’emploi qui répondaient à nos besoins, nous avons donc conçu la nôtre. Après quelques itérations, nous avons eu un système de caméra vidéo qui pourrait enregistrer pendant plusieurs jours et s’intégrer à nos baies. Le choix des enregistreurs acoustiques était plus facile car des produits prêts à l’emploi étaient disponibles. Nous avons utilisé deux modèles différents : un enregistreur AMAR 6 canaux de JASCO Sciences Appliquées et un SoundTrap 4 canaux de Instruments de l’océan. Nous avons regroupé ces instruments sur trois plates-formes différentes : un large réseau, un mini réseau et un réseau mobile. Les grandes et mini baies sont des plates-formes autonomes statiques qui peuvent être déployées sur le fond marin et enregistrer de l’audio et de la vidéo pendant une à deux semaines. Le réseau mobile est monté sur un véhicule télécommandé avec vidéo intégrée qui permet un contrôle à distance et un positionnement en temps réel en réponse à la présence de poissons observée. Chaque tableau a été conçu avec différentes contraintes à l’esprit. Le grand réseau est configuré pour la localisation acoustique 3D la plus précise, le mini réseau pour des déploiements plus faciles sur des fonds marins accidentés/irréguliers, et le réseau mobile pour un échantillonnage spatial dynamique en temps réel sur des périodes plus courtes (des heures plutôt que des jours ou des semaines). Ces trois conceptions nous ont permis d’identifier les sons des poissons dans une variété d’habitats. Pour quelques histoires sur le processus de développement de ces plates-formes, nous encourageons le lecteur à explorer notre Blogue du projet Fish Sound.

Comparaison des trois réseaux audio-vidéo.
Résultats de la localisation 3D des sons des sébastes cuivrés à l’aide du réseau mobile.

Nouvelles découvertes et implications pour la conservation marine

Nous avons déployé ces trois réseaux à quatre endroits au large de la Colombie-Britannique, au Canada, et identifié, pour la première fois, des sons émis par des sébastes à dos épineux (Sébastes maliger), sébaste cuivré (Sebastes caurinus) et la morue-lingue (Ophiodon allongé). Ces sons nouvellement identifiés sont d’un grand intérêt pour la conservation des poissons. En Colombie-Britannique, les sébastes à dos épineux sont désignés comme menacé par le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC) et la population de morues-lingues trouvée dans le détroit de Géorgie est évaluée comme dans le prudent zone dans le cadre de l’approche de précaution décrite par Pêches et Océans Canada. Bien que davantage de données soient nécessaires pour décrire pleinement leur répertoire, ces résultats montrent que l’acoustique passive a un fort potentiel pour améliorer la surveillance et la gestion de ces importantes espèces de poissons.

Sons de la morue-lingue (Ophiodon elongatus), du sébaste cuivré (Sebastes caurinus) et du sébaste à dos épineux (Sebastes maliger) identifiés pour la première fois.

Jusqu’où peut-on entendre les cris des poissons ?

C’est une question importante qui nous est souvent posée mais à laquelle nous ne pouvons pas toujours répondre. C’est important car savoir jusqu’où nous pouvons détecter les sons des poissons définit le nombre d’hydrophones nécessaires pour surveiller un environnement donné. Comme nous pouvions localiser avec précision les sons des poissons en 3D avec les réseaux audio-vidéo, nous avons pu mesurer le niveau sonore des poissons (c’est-à-dire le niveau de la source) pour estimer à quelle distance de l’hydrophone les sons des poissons peuvent être détectés. Les sons des sébastes à dos épineux peuvent être détectés jusqu’à 33 m dans un environnement relativement calme (Hornby Island) mais seulement jusqu’à 10 m dans un environnement plus bruyant (Mill Bay, à proximité d’une marina). Ces valeurs de portée de détection seront importantes à prendre en compte lors du suivi de cette espèce à l’avenir.

Accessibilité et évolutivité

Maintenant que nous avons montré que ces réseaux peuvent identifier et caractériser les sons des poissons dans la nature, nous devons rendre ces instruments plus facilement accessibles afin qu’ils puissent être construits et déployés à plus grande échelle dans d’autres parties du monde où l’acoustique passive peut aider à surveiller les populations de poissons (par exemple, les écosystèmes des récifs coralliens). Parallèlement à notre article, nous avons fourni des instructions de construction détaillées pour les matrices audio-vidéo ainsi que des scripts de traitement et des cahiers pour effectuer la localisation 3D. Des efforts futurs sont nécessaires pour rendre ces instruments moins chers et plus conviviaux afin que les non-experts (par exemple, les amateurs, les plongeurs, les écoles) puissent les utiliser à l’échelle mondiale pour élargir le catalogue mondial des sons de poissons.

Vous pouvez préparer l’article complet Identification des sons de poissons dans la nature à l’aide d’un ensemble de matrices audio-vidéo portables ici!





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